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https://matelma.com/fr-fr   /    jeudi 21 Novembre 2024

Le machaon, de la chenille au papillon

Le machaon, appelé aussi "grand porte-queue" (Papilio machaon) est un papillon gracieux, pour ne pas dire l'un des plus beaux papillons que nous pouvons voir virevolter dans nos régions. C'était donc une expérience inoubliable pour moi d'assister de si près à l'évolution complète d'un petit oeuf, qui s'est transformé au fil de différentes phases en un papillon adulte. 

Ce qui va suivre ici est un récit enrichisssant mais en même temps triste. Mon ami et moi avons découvert que les choses pouvaient mal tourner et combien la nature peut être dure avec elle-même. Chaque espèce se bat en définitive pour sa propre survie et cela, bien souvent aux dépens des autres. 

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Quelques anecdotes au sujet du machaon

Ce n'est pas une espèce de papillon menacée mais du fait de sa taille et de la beauté de ses couleurs, le machaon se révèle comme une apparition spectaculaire au jardin. Et qui ne s'observe pas tous les jours.  J'ai pourtant l'impression que cette année a été un bon cru pour cette espèce. Contrairement aux années précédentes, nous avons pu l'observer plusieurs fois au jardin, généralement attiré par la délicieuse odeur du buddléia de David. 
Le machaon a une envergure d'environ 75 mm et il vole en moyenne en deux générations par an. La première génération de la fin du mois d'avril jusqu'au milieu de juin et la deuxième du début juillet au début du mois de septembre. Lors d'un automne clément, nous pouvons encore observer une troisième génération en octobre. Un papillon adulte vit environ trois semaines. Durant cette période, il part à la recherche d'un partenaire pour se reproduire.  

Ses ailes d'un jaune pâle sont délimitées par des lignes noires. Sur les ailes arrières, qui finissent en petites queues, la bande noire est colorée de bleu avec deux pois oranges, impossibles à rater. Les mâles et les femelles ont des coloris quasiment identiques. Pour distinguer l'un de l'autre, c'est assez simple. La femelle est un peu plus grande et possède un abdomen plus renflé. Celui du mâle est plus pointu.


Tout commence avec le choix de la bonne plante hôte

Vous n'avez pas besoin d'avoir un grand jardin pour apporter votre petite pierre à l'accroissement de la biodiversité. Mon ami et moi sommes tous les deux entichés de nature et captivés par tout ce qui vole ou rampe dans et autour des arbustes. Notre petit jardin de ville est aussi entièrement aménagé en  fonction de la présence d'insectes et d'oiseaux. Aucun désordre non, mais plutôt un jardin de plantes structuré qui a à offrir quelque chose en chaque saison. Tous les animaux sont les bienvenus chez nous! 

Dans l'espoir d'avoir dans notre jardin un machaon qui déciderait d'en faire sa nurserie, nous avons planté juste après le lockdown, en juin, du fenouil dans un pot.  De fait, le fenouil constitue l'une des plantes hôtes sur lesquelles le macaon pond ses oeufs. Cela valait donc le coup d'essayer. 

Dans une jardinerie des environs, nous avons pu dénicher d'autres petites plantes utiles à notre projet.  L'euphorie était grande. Et plus encore quelques mois plus tard, le 4 août, quand une femelle s'est posée sur les plantes, devenues adultes, pour y pondre 5 oeufs. Malheureusement, je n'ai pas pu assister à ce moment, mais mon ami, qui est photographe amateur, a pu capturer ce moment en images. Nous étions si contents que le papillon ait choisi notre jardin. C'est tout de même incroyable de voir comment ces petites créatures perçoivent leur environnement et aussi comment elles savent trouver les bonnes plantes. 

De l'oeuf aux chenilles

van rups tot vlinderAvec grande attention, nous avons gardé les 5 petits oeufs à l'oeil.  D'apparence banale et bien camouflés, ils pendaient sur la plante de fenouil. Jusqu'à ce qu'apparaissent quelques jours plus tard les premières chenilles. De couleur noire et de quelques millimètres de long seulement, sans aucune ressemblance avec les chenilles adultes et moins encore avec l'imago (le papillon adulte). Les chenilles ont seulement une fonction à remplir, celle de manger le plus possible. Elles le font très bien sur la plante hôte et grandissent ainsi à vue d'oeil. 

Les chenilles passent par différents stades durant lesquels elles vont muer plusieurs fois et grandir toujours plus. Elles changent à chaque fois de couleur.  Lors de la mue, l'ancienne peau se déchire et de laquelle surgit une nouvelle chenille.  La vieille peau est ensuite mangée par les chenilles. Après cela, elles semblent sur le point d'exploser et grandissent notablement. 

volwassen vlinderUn jour où je me trouvais devant la plante, grande fut ma stupeur de ne plus voir que trois chenilles. Je n'avais plus de trace de l'une des chenilles et d'une autre, il ne restait que quelques fragments. J'avais à coeur de concevoir immédiatement un plan de secours pour protéger les autres chenilles. Le pot avec le fenouil a rapidement déménagé dans notre salon. Un endroit sécurisé, sans prédateurs, où elles pourraient sans souci se transformer en papillons. Jusqu'à ce qu'un ami nous apprenne que l'horloge biologique des animaux allait être perturbée. En les conservant à l'intérieur, à température ambiante, leur rythme allait être modifié.  Sans tarder, le pot de fenouil a repris le chemin de la terrasse mais non sans une protection adéquate. Nous avons placé un grillage autour du pot avec au-dessus un fin filet anti-insectes.  Les chenilles étaient de retour, mais cette fois en sécurité! 

De la chrysalide au papillon

Les trois chenilles survivantes sont devenues adultes et ont reçu leur belle couleur verte. Le 20 août, la première chenille était prête pour entamer sa transformation en pupe. Dans cette phase, la chenille part à la recherche de la tige appropriée pour s'y attacher. Pour laisser le choix aux chenilles, nous avons piqué un certain nombre de grandes et solides branches entre le fenouil. Après quelques tentatives d'évasion hors de l'environnement protégé, la chenille a finalement trouvé un endroit adapté. Elle a choisi une branche au-dessus du fenouil. 

Verpopping van de rupsUne fois que l'endroit est choisi, la chenille tisse une peau sur la branche et tend une ceinture de soie qui permet au corps de la chenille de s'ancrer à la branche ou à la plante. Deux jours plus tard, la peau de la chenille devient comme du parchemin et il devient évident que le processus est entamé. Hélas, j'ai raté également ce moment mais les photos envoyées par mon ami m'ont fait beaucoup de bien. Cela ressemblait bien à une scène de science-fiction. La peau s'est déchirée pour la dernière fois, en commençant par la tête. La chrysalide verte est apparue progressivement. Un processus qui s'est passé très vite. En quelques minutes, la chenille est devenue chrysalide.  Elle a secoué sa dernière peau de mue et voilà que nous avons pu voir suspendue notre première chrysalide.  La couleur verte de la chenille semble être aussi la couleur de la chrysalide. Et en dépit de la mue, elle est toujours bien fixée à la branche avec la ceinture naturelle. Un vrai miracle que j'ai heureusement pu observer de mes yeux , au travers de l'objectif de mon appareil photo. Quelle expérience, vécue avec le souffle coupé. 

Dans la chrysalide, le corps de la chenille est presque complètement décomposé.  On nomme ladite métamorphose histolyse.  D'un certain nombre de cellules souches restantes, se découvrent toutes les parties du papillon. Selon la météo et la période de l'année, ce processus peut prendre entre quelques semaines et quelques mois. Les chrysalides tardives vont passer l'hiver et éclore au printemps. 

Vlinder net uit de popIl faisait encore et toujours beau quand une chrysalide a commencé à se colorer le 13 septembre. Un peu inattendu pour nous, car pour nous ce n'était pas évident de deviner si le papillon allait surgir ou si la chrysalide allait se préparer à passer l'hiver. Les ailes du machaon étaient clairement visibles à travers la peau. Je n'aurais jamais pensé que cela irait si vite. Nous avions quitté la maison un moment. Et à notre retour, nous avons été interloqués de voir un machaon posé sur une branche. Un peu déçus aussi de ne pas avoir pu assister à la dernière transformation mais d'un autre côté si contents de pouvoir contempler le papillon. Il était parfait et éblouissant! Quel soulagement de le voir s'envoler après l'élimination du grillage protecteur. La peau de la chrysalide avec un peu d'excréments est restée là, abandonnée. Cela nous a donné le sentiment du devoir accompli. Tous nos efforts n'ont donc pas été réalisés pour rien! 

Des prédateurs

C'était le beau côté du récit car toutes les chenilles ne deviennent pas des papillons. Le principe de manger ou d'être mangé se révèle bien souvent ici comme un rabat-joie. Toutes les petites créatures vivantes mangent mais sont aussi mangées et elles ont besoin de chacun pour survivre. 

D'un ami, nous avons encore reçu trois chenilles trouvées dans son potager. Elles furent bienvenues et ont reçu les mêmes soins que les autres.  L'une des trois a mué peu de temps après son arrivée.  Dans un moment d'inattention alors que nous venions juste de retirer le filet anti-insectes pour arroser la plante, les choses ont mal tourné. Une guêpe commune a remarqué la chenille fraîchement muée et a vu ce spectacle comme un délicieux casse-croûte possible. Alors que nous sommes revenus quelques minutes plus tard, la chenille était morte, réduite en petits morceaux pour être amenée dans le nid. Les guêpes sont d'excellentes chasseuses et sont folles des chenilles à dévorer. Nous étions perplexes et nous ressentions de la culpabilité. Pourquoi avions-nous retiré le filet? Mais bon, c'est la loi de la nature, nous ne pouvions rien faire d'autre que de l'accepter. 

Bronswesp op popLes chenilles encore restantes se sont transformées en chrysalides. Il y en avait encore 4. Sur trois d'entre elles, nous avons vu se poser une petite mouche, un petit insecte qui aime bien s'attarder dans le voisinage des chrysalides. Cela nous semblait étrange et nous avons essayé de l'éliminer avec un doux petit pinceau. Au début, les chrysalides ont réagi au contact mais plus tard, non. Après la prise d'une photo en mode macro, nous avons pu déterminer de quel insecte il s'agissait.  Il semblait bien que celui-ci était une guêpe parasitaire qui avait utilisé la chrysalide comme hôte pour y pondre ses petits oeufs. Les larves de la guêpe ont grandi dans la chrysalide qui a été progressivement consommée par ses hôtes et qui, fatalement, ne pourra jamais se transformer en papillon.  

Jusqu'à présent, trois chrysalides sont toujours suspendues dans le plant de fenouil. L'une d'entre elle semble complètement momifiée et presque noire. 

A ce jour, il y a encore une chrysalide qui n'est pas atteinte. Espérons qu'elle devienne un beau papillon, bientôt ou l'an prochain. Croisons les doigts! 

Photos: Wim Acke

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Auteur: Inge

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