Magnifique spectacle que la naissance d'un machaon
L'an passé, je vous ai déjà raconté comment la chenille d'un machaon se métamorphosait pour devenir au final un très beau papillon. Une transformation qui ne déroulait pas toujours comme prévu. Un combat permanent avec les lois de la nature et le danger des prédateurs qui rôdent en permanence. Mais un récit particulièrement fascinant que nous avons pu admirer de nos propres yeux. Je veux désormais partager la suite avec vous.
Chrysalides parasitées
Fin septembre 2020, les quatre chenilles survivantes se sont métamorphosées. Trois chrysalides furent malheureusement parasitées par une guêpe de la famille des torymidae et plus viables. De l'une d'entre elles, de petites guêpes sont sorties quelques semaines plus tard, de mini guêpes de la famille des ichneumonidae de seulement quelques millimètres de long. Dans la chrysalide, nous avons remarqué de petites ouvertures desquelles elles sont apparues. Avec leurs corps d'un joli bronze métallisé, elles étaient réellement belles. La chrysalide n'est pas devenue un papillon mais a donné lieu à une expérience unique. Dans les deux autres chrysalides, il n'y avait plus de vie détectable. Elles étaient devenues complètement noires et mortes.
Hivernage
Pour la dernière chrysalide encore vivante, le temps était devenu trop froid pour lui permettre de se développer en papillon et de fonder les bases d'une nouvelle génération. Hiberner était donc pour elle la meilleure option. Heureusement, la chrysalide avait pris soin de tisser un câble de ceinture pour s'attacher à une branche plantée par nos soins entre les plantes de fenouil. Et heureusement qu'elle avait choisi la branche car les plants de fenouil ne sont pas résistants au froid. Donc, pas vraiment une bonne base pour s'y attacher.
Je dois avouer que nous avons vraiment tout fait pour protéger la chrysalide et lui permettre de passer l'hiver en toute sécurité, de façon confortable. La petite branche où elle avait pris place a déménagé vers un pot à fleurs plus petit. Pour maintenir à distance les oiseaux toujours affamés et d'autres dangers, mon ami a construit pour la chrysalide une cage sur mesure mais bien vaste (environ 1 x 1 x 1,5 m). La cage a été déposée dans un coin de la terrasse. Protégée d'un côté par un écran de jardin et de l'autre jouxtant un bac à fleurs. L'armature en bois avec un grillage fin anti-insectes devait offrir suffisament de protection durant les mois à venir. Et si la chrysalide devait éclore de façon inattendue, le papillon aurait au moins assez d'espace pour voltiger avant que nous puissons le libérer.
Durant des mois la chrysalide a enduré les intempéries et le vent : la pluie battante, une tempête, des températures glaciales, du gel, de la neige et puis du soleil. Inimaginable situation que celle de cette petite chrysalide, si fragile, capable de survivre à de telles conditions climatiques! C'est tout simplement incroyable. Mais la chrysalide est restée courageusement attachée à sa branche, assurée par la ceinture. Elle est restée jolie avec sa teinte verte. Nous l'avons régulièrement vérifié.
Voici le printemps
Et soudain, le printemps a fait son apparition mais sans hausse des températures. Sous des conditions normales; les premiers papillons se métamorphosent à partir de la fin avril, à condition bien sûr qu'il fasse suffisamment chaud. Mais ce mois de mai fut un mois particulièrement froid et humide et la chrysalide est restée attachée. Elle était encore bien verte mais nous avons tout de même douté du fait de savoir si elle allait devenir ou non un papillon. Quel soulagement que de voir le mercredi 19 mai les premiers changements de couleur. La forme du papillon devenait peu à peu visible. Ouf, il y avait donc encore une vie effective à l'intérieur! Les jours suivants furent particulièrement excitants. La météo était peu clémente et la pluie tombait en abondance. Pas vraiment des circonstances idéales pour un papillon. Jusqu'à ce que le soleil fasse son apparition le dimanche. A l'exception du vent, ce fut pour nous le meilleur jour, cela ne pouvait pas se dérouler un autre jour que celui-ci! Nous nous sommes levés tous les deux de bonne heure, pleins d'adrénaline, plongés au jardin. Dans l'attente de la naissance. La chrysalide dans le pot à fleurs, placée dans un bel emplacement au jardin. La caméra et l'appareil photo en stand-by.
Le moment suprême
Nous n'avons pas quitté la chrysalide des yeux de peur de la voir prise à partie par un insecte ou un oiseau. Pas de risques à prendre! La chrysalide bougeait avec le vent mais le mouvement qu'elle a effectué était dû à autre chose. J'ai hurlé d'émotion, j'ai couru vers la caméra pour filmer l'événement. Et en effet, le moment tant attendu, que nous avions guetté depuis si longtemps, était enfin arrivé. La chrysalide a éclaté sur la face supérieure et le papillon a vu la lumière du jour pour la première fois. Il a rampé à l'extérieur et a laissé derrière lui un peu de matières fécales. Tout s'est passé si vite. Avant que nous puissions réaliser, le papillon se trouvait déjà au-dessus de la branche avec ses ailes encore repliées. La chrysalide est restée suspendue sous la branche. Les ailes du machaon se sont agitées et se sont ouvertes lentement. Elles devaient d'abord se sécher complètement avant de permettre au papillon de voler. Pendant près de deux heures, le papillon est resté ainsi, probablement plus longtemps que la normale car le vent ne facilitait pas la tâche. De temps en temps, le papillon tentait un essai pour ouvrir complètement ses ailes et puis, soudain, sa beauté est pleinement apparue. C'était indubitablement une expérience qui n'arrive qu'une fois dans sa vie!
Finalement, le papillon a pris joyeusement son envol. Espérons qu'il ou elle a trouvé un partenaire pour fonder une nouvelle génération de machaons. Les nouvelles plantes de fenouil sont déjà prêtes au jardin!
Photos : Wim Acke & Inge De Smet